Passionnée de musique, de sciences, et de technologie, Pauline a su mettre en commun tous ces univers pour devenir Docteur en acoustique. Aujourd’hui à la tête de Syos, elle ne cesse de ravir le son des saxophonistes du monde entier en créant des becs pour saxophone imprimés en 3D avec une esthétique sonore personnelle à chaque musicien.
– Qui êtes-vous ?
Je m’appelle Pauline, je suis passionnée de musique depuis que je suis toute petite. J’ai d’abord commencé par jouer de la flûte traversière, puis de la guitare, de la basse et du saxophone ! Je suis aussi passionnée de sciences et de technologie et pour allier tout ça j’ai donc étudié l’acoustique à l’École Centrale Marseille puis j’ai fait une thèse à l’Ircam où j’ai développé un logiciel permettant d’aider les fabricants d’instruments de musique à prédire la qualité de leurs instruments avant de les fabriquer. Ensuite j’ai travaillé un an comme chercheur à l’Université McGill de Montréal où j’étudiais l’acoustique des becs de saxophone. Je devais normalement enchaîner sur un contrat de recherche au Mexique, mais finalement je suis rentrée en France et j’ai créé Syos !
– Passionnée par la musique, la science, et la technologie, vous êtes Docteur en acoustique. En quoi cela consiste ?
Cela veut dire que j’ai fait une thèse (3 ans de recherche dans un laboratoire, à l’Ircam à Paris en collaboration avec le Laboratoire d’Acoustique de l’Université du Mans). L’acoustique c’est la science des sons, ce qui regroupe beaucoup de choses : l’acoustique des salles par exemple étudie comment les ondes sonores se propagent dans un bâtiment, la psychoacoustique étudie comment les personnes perçoivent les sons, etc. J’ai étudié tout cela dans mon école d’ingénieur, mais ensuite pendant ma thèse je me suis spécialisée en acoustique musicale où j’étudiais la physique des instruments de musique. On peut donc dire qu’en tant que Docteur, je suis spécialiste de comment fonctionnent les instruments de musique. D’ailleurs j’écris régulièrement des articles sur l’acoustique des instruments de musique (et principalement le saxophone) sur le blog de Syos.
– En 2015 alors que vous étiez à l’Ircam, vous avez fondé Syos avec Maxime Carron. D’où vous est venue cette idée de fabriquer des becs pour saxophone imprimés en 3D ?
L’idée est venue quand j’étais à McGill. Je faisais des simulations numériques du comportement aéroacoustique des becs de saxophones. Pour pouvoir comparer mes résultats avec le ressenti des musiciens, j’ai décidé d’imprimer en 3D les différentes géométries de becs que j’avais étudiées. Les musiciens qui ont testé ont tous beaucoup apprécié et certains m’ont même demandé s’ils pouvaient acheter les becs. L’idée que mes résultats de recherche puissent être applicables à un produit utilisable par les musiciens m’a plu et je me suis lancée ! Quelques mois plus tard, je rencontre Maxime à l’Ircam qui faisait une thèse en psychoacoustique. De nos deux spécialités est né Syos !
– Quelles sont les étapes pour créer un bec qui puisse avoir l’esthétique sonore souhaitée ?
Avec nos recherches en acoustique et en psychoacoustique, nous avons développé un algorithme qui sont capable de transcrire les mots utilisés par le musicien pour décrire le son de ses rêves en une géométrie de bec lui permettant d’obtenir ce son plus facilement.Nous avons un questionnaire en ligne où le musicien répond à des questions sur le type de musique qu’il joue, le type de son qu’il recherche (brillant ou mat, puissant ou retenu, large ou centré), etc. D’après ses réponses nous générons une géométrie de bec adaptée, qui est ensuite imprimée en 3D directement dans nos locaux à Paris.
– Les becs que vous concevez sont à destination des saxophonistes professionnels, et amateurs. Comment vous êtes-vous imposé dans ce milieu ?
Nous avons dès le départ collaboré avec de grands musiciens de renom comme Thomas de Pourquery, Victoire du Jazz 2017 ou Dayna Stephens, grand jazzman américain, qui ont été parmi les premiers à jouer avec nos becs. Et comme nous sommes les seuls à faire des becs en couleur, on s’est assez vite fait remarquer 😉 Mais on s’est surtout imposé, car nous faisons des becs de qualité, qui sont plus justes, plus homogènes et plus faciles à jouer que la majorité des autres becs. Et quand en plus, le musicien peut avoir un bec vraiment adapté à son son, pourquoi aller voir ailleurs ?
– Pour vous, le ressenti du musicien est très important. Quelles relations avez-vous avec eux ?
Oui le ressenti du musicien est très important, c’est pour cela que la psychoacoustique est au coeur de Syos. Notre seul but est de fournir au musicien le meilleur outil possible pour sa musique. Des musiciens nous disent assez régulièrement que, depuis qu’ils ont leur bec Syos, ils se sentent plus libres, car ils obtiennent le son qu’ils veulent plus facilement. Et comme ils n’ont plus besoin de se concentrer sur l’obtention de ce son, cela laisse plus de place à leur créativité. Ça nous fait plaisir d’entendre des choses comme ça 🙂 En tout cas on essaie d’être le plus proche possible de tous les musiciens, de discuter avec eux pour toujours bien comprendre ce qu’ils veulent. Nos clients sont très contents de cette proximité, ils sentent qu’ils sont écoutés !
– Aujourd’hui, les becs Syos sont utilisés partout dans le monde. Comment envisagez-vous l’avenir ?
Nos clients sont quand même surtout situés en Europe et Amérique du Nord. Il nous reste encore pas mal de travail pour augmenter nos ventes avec un gros marché qui nous reste encore inconnu, celui de l’Asie. Puis nous sommes déjà en train de développer de nouveaux produits. Nous travaillons sur les becs de clarinette que nous souhaitons commencer à commercialiser en 2019. Viendront ensuite les embouchures de cuivres (trompettes, trombone…) puis d’autres instruments, mais je ne peux pas encore tout dévoiler…