
Plonger dans l’invisible, révéler ce qui échappe au regard : c’est le terrain d’exploration de Lukas Persyn, artiste visuel basé à Rennes. À travers ses installations numériques, il donne forme à l’infrastructure cachée de notre monde. L’impression 3D, la découpe laser et les outils de fabrication deviennent matière sensible. Formateur chez Electroni[k], il partage une pratique où technique et émotion se rencontrent, invitant à redécouvrir le réel autrement.
Qui es-tu ?
Je m’appelle Lukas Persyn, artiste visuel basé à Rennes. Je développe des installations, souvent numériques, qui interrogent ce qui reste invisible ou imperceptible dans notre environnement.
Tu explores souvent des structures invisibles ou négligées : qu’est-ce qui t’attire dans ce qui échappe au regard ?
Cela commence toujours par une forme d’intrigue. Qu’est-ce que cette structure ? À quoi sert-elle vraiment ?
Ces infrastructures traversent notre quotidien, non seulement dans nos paysages, mais aussi dans nos gestes et nos usages. Elles régissent nos vies discrètement, souvent pensées justement pour qu’on ne les remarque pas. C’est cette dimension presque magique qui me fascine et que je cherche à révéler. Prenons le numérique : il est partout, mais on commence seulement à mesurer ses impacts écologiques, sociaux, intimes. Rendre visibles les infrastructures qui le soutiennent, c’est déjà amorcer une réflexion sur nos usages.
Quelle place occupent les outils numériques et technologiques dans ton travail ?
Ils sont centraux, tant dans les sujets que j’aborde que dans les formes que je donne aux pièces. Cela s’est construit progressivement : l’achat d’une première imprimante 3D, puis mon poste d’assistant au FabLab de l’EESAB à Rennes quand j’étais étudiant. Ces expériences ont ouvert un territoire.
Tu crées des dispositifs sensibles et parfois complexes : travailles-tu avec d’autres Makers, ingénieurs, artisans ou techniciens ?
Je travaille essentiellement seul, mais je me suis formé grâce à la communauté des Makers en ligne et à des passionnés rencontrés en chemin. Peu à peu, je collabore davantage avec d’autres artistes qui explorent le numérique, et j’espère bientôt avec des scientifiques.
Tu interviens comme formateur chez Electroni[k], une association qui relie création artistique et culture numérique. Qu’est-ce que tu cherches à transmettre dans ces ateliers ?
Je veux montrer que le numérique peut être un espace généreux, pas seulement technique ou froid, mais capable de nourrir des projets collectifs et de permettre d’acquérir rapidement de nouvelles compétences.
Quel conseil donnerais-tu à quelqu’un qui souhaite mêler création artistique et technologies, sans perdre la dimension sensible ?
Que la technique reste un outil, pas une fin. Il ne s’agit pas de créer à tout prix quelque chose d’interactif ou de spectaculaire. Parfois, le numérique ne se voit pas dans la pièce finie, mais il a été présent à la conception, à la production. Et si l’on utilise des outils de fabrication numérique, découpe laser, impression 3D, CNC, il me semble important de réfléchir à la manière d’en lisser la trace. On peut très bien imprimer en 3D tout en travaillant les motifs, les formes, pour s’éloigner d’une esthétique trop technique, sans pour autant passer des heures à poncer ou à peindre.