Alain Thibaudeau, ingénieur en conception industrielle, dirige FlyCopter Project SAS depuis 2023. Fort de 25 ans d’expérience dans la conception de machines spéciales, il développe aujourd’hui un ULM biplace à décollage vertical doté d’une nacelle stabilisée. Inspiré du biomimétisme et des avancées technologiques récentes, son projet vise à révolutionner la mobilité aérienne en offrant un mode de transport plus sûr, plus accessible et plus écologique. Actuellement en campagne de financement participatif sur We Do Good, FlyCopter Project ambitionne de finaliser un premier démonstrateur et d’ouvrir la voie à une nouvelle génération de véhicules volants.
Qui es-tu ?
Alain Thibaudeau, je dirige l’entreprise FlyCopter Project SAS depuis août 2023. Nous développons des solutions innovantes à impact social et environnemental. Nous mettons l’humain au cœur de nos innovations.
Notre solution la plus impactante, localement et mondialement, est un ULM biplace à décollage vertical. Notre innovation réside dans la nacelle stabilisée (comme les caméras gimbal sur les drones), qui permet de résoudre le problème de la transition de vol. En effet, après le décollage, il faut voler avec des ailes, comme les oiseaux, car c’est le mode de transport le plus efficace. Ces derniers nous le prouvent tous les jours : ils sont les plus grands migrateurs terrestres au monde. (La sterne arctique voyage du pôle Nord au pôle Sud chaque année, parcourant 70 000 km annuels.)
Peux-tu nous parler de ton parcours et de ce qui a éveillé ton intérêt pour le dessin et la conception industrielle ?
Après un DUT GMP (Génie Mécanique et Productique) à Cholet et un DU Conception et Gestion de Projet Industriel, 25 ans à dessiner des machines spéciales dans tous les domaines, de l’agricole au nucléaire, en passant par les matériaux, l’automobile, l’aéronautique, le naval et l’agroalimentaire.
J’ai toujours aimé dessiner, notamment les véhicules automobiles. J’ai toujours été fasciné par un certain Léonard de Vinci. Je ne pourrai jamais rivaliser avec sa Joconde, mais nous avons aujourd’hui accès à des technologies dont il ne disposait pas, ce qui nous permet de créer des innovations qu’il n’a pas pu inventer en son temps. Si je ne peux pas dessiner Mona Lisa, je peux créer de bien meilleurs véhicules.
Depuis 2023, tu te consacres au développement du Flycopter Project, un ULM électrique. Quelles sont les origines de ce projet, et qu’est-ce qui t’a inspiré à imaginer une solution aussi innovante ?
Pendant mes études à la fin des années 2000, je me suis interrogé sur mon orientation professionnelle : est-ce le bon métier pour moi ? Est-ce que je vais pouvoir apporter des bienfaits aux autres ?
Pour ce cas de conscience, exit les innovations militaires, il me fallait résoudre un cas concret pour choisir ma voie.
Déjà en 2000, les difficultés de transport existaient, surtout en campagne où je vivais, et l’espace au sol devenait pourtant déjà saturé. La voie des airs était une solution, mais une problématique empêchait son déploiement : il faut une piste pour décoller.
Après analyse de l’état de l’art, j’ai découvert les « Tails Sitter », des avions qui décollaient verticalement dans les années 60. Ces projets n’ont pas abouti, car ils n’étaient pas assez avancés, et l’hélicoptère a pris son envol. Néanmoins, tout le monde ne pourra pas avoir un hélicoptère bruyant, avec des pales dangereuses et un pilotage réservé à des experts.
Le principe d’un « Tail Sitter » est de poser un avion verticalement sur son empennage – sa queue, si vous préférez. Rien de plus simple.
Problèmes : un cockpit à plusieurs mètres du sol, un décollage en position astronaute avec les pieds au-dessus de la tête… « Pas pratique pour ma grand-mère », ai-je pensé à l’époque, sans compter l’emploi de gros moteurs ou de jets propulseurs.
La solution simple était de déporter le poste de commande, posé au-dessus de l’appareil, sous le ventre et de le suspendre pour qu’il pivote en fonction du redressement de l’appareil, permettant ainsi un vol à plat.
La technologie n’était pas prête en 2000, mais sont arrivés les quadricoptères, d’abord comme jouets pour enfants, puis avec des motorisations électriques plus puissantes. Ensuite, les premiers VTOL (Vertical Take-Off and Landing), ou ADAV en français (Appareil à Décollage et Atterrissage Vertical), ont apporté les dernières avancées rendant possible l’idée d’un véhicule à nacelle pivotante, devenue stabilisée pour plus de confort et pour supprimer les rebonds et les mouvements d’oscillation.
Quelles compétences acquises au cours de ta carrière te servent aujourd’hui dans le développement de ce projet ?
Toutes mes compétences en conception et en gestion de projet me servent, et je dois même en acquérir de nouvelles pour diriger une entreprise innovante : savoir communiquer, trouver des fonds, gérer l’administratif, le comptable… Heureusement, il y a d’autres personnes pour m’aider.
Toutes mes connaissances techniques, ma maîtrise de l’état de l’art et les contacts que j’ai noués, professionnellement et en dehors, me montrent la voie vers l’objectif d’un premier démonstrateur, d’une première mondiale si nous ne tardons pas trop.
En quoi le Flycopter se distingue-t-il des autres solutions de transport aérien léger ?
Nous avons choisi de développer un ULM pour son accès réglementaire simplifié. Non seulement cette réglementation nous permet de construire un véhicule dans un garage (idéal pour une startup, Zuckerberg et consorts ont commencé comme cela) sans certifications aéronautiques lourdes et complexes, mais elle offre aussi, et surtout, la possibilité pour vous, à terme, et pour moi de pouvoir utiliser ces engins.
Pour piloter un ULM, vous devez avoir 15 ans, passer le BIA (Brevet d’Initiation Aéronautique) – un QCM de 100 questions équivalent au code de la route – et obtenir la licence ULM de la catégorie concernée, qui coûte environ 2000 euros et nécessite 20 heures de pratique.
Je peux déjà vous annoncer que vous pourrez bientôt piloter encore plus simplement. Notre technologie étant en partie basée sur celle des drones, le décollage et le vol automatisés par points GPS seront aussi simples que de programmer votre GPS automobile et d’appuyer sur « Run »… ou plutôt « Fly », pour laisser l’appareil vous déplacer automatiquement. Ce sera encore plus sûr qu’un avion actuel, qui doit rouler sur un sol inégal. Vous resterez maître de l’appareil et pourrez déclencher un parachute fixé à la nacelle en cas d’ultime urgence, garantissant encore plus de sécurité.
La nacelle stable vous permettra de ne pas être malade en vol, de ne pas être désorienté et de profiter pleinement du paysage.
La nacelle stabilisée permet à l’aile motorisée de se positionner automatiquement en fonction des phases de vol et des perturbations, réduisant ainsi la consommation et augmentant la vitesse.
Notre solution et ses dérivés sont tellement légers et simples à mettre en œuvre que nous visons les catégories ultra-légères les plus restrictives, qui sont françaises, car le poids est la composante la plus importante pour voler.
Le concept met en avant des valeurs comme le biomimétisme et la durabilité. Comment as-tu intégré ces principes dans la conception de l’appareil ?
Les meilleures solutions sont dans la nature, des millénaires à parfaire ses techniques pour voler, marcher, nager.
En intégrant ces principes dès la conception de l’appareil et des gammes à venir, c’est assez simple. Il ne faut pas toujours copier les solutions de nos pères, mais nous en inspirer. Nous ne réinventons pas les hélices ni les ailes des avions, nous les adaptons à notre nouvelle architecture aéronautique. C’est ce que l’on appelle une rupture technologique, quand une nouvelle technologie permet de nouvelles possibilités qui vont entraîner des changements dans notre société (comme la roue à son époque ou le téléphone portable plus récemment). Les oiseaux ont naturellement une nacelle stabilisée. Prenez n’importe quel oiseau, une poule par exemple : mettez-la à plat sur le ventre, tournez-la dans tous les sens, sa tête reste alignée sur l’horizon.
Il n’y a pas de raison que nous, humains, n’ayons pas ce confort. Les poules et les caméras sont stabilisées ; vous aussi, vous y avez droit. Fini d’être ballottés dans tous les sens en avion ou en voiture.
Il n’y a pas de nids-de-poule dans les airs, pas non plus d’obstacles, ni de piétons à laisser traverser. Notre technologie va même permettre de s’arrêter en plein vol, comme le font les oiseaux, et donc résoudre le problème du décrochage en aviation, qui fait que si un avion ne vole pas assez vite, il tombe.
Les FlyCopter, comme les oiseaux, vont passer du vol avion à du vol stationnaire type multicoptère, faire ce que certains nomment déjà un « stop&go » pour encore plus de sécurité.
Le projet Flycopter Project est actuellement en campagne sur la plateforme We Do Good. Pourquoi avoir opté pour le financement participatif, et quels objectifs souhaites-tu atteindre grâce à cette campagne ?
Nous avons choisi le financement participatif sur la plateforme We Do Good, car vous avez le droit de percevoir les dividendes, les bénéfices que nous allons générer.
Nous avons déjà trois clients potentiels qui souhaiteraient au plus vite acquérir un total de 12 appareils, soit un chiffre d’affaires possible de 2,4 M€ avec une marge intéressante sur la rareté.
Nous ne pouvons révolutionner la mobilité tout seuls, et cela n’aurait pas de sens. Ces innovations doivent servir à tous. Nous mettons l’humain au centre de nos innovations ; il est donc normal de vous faire embarquer dans l’aventure du siècle, du millénaire.
Nul ne peut dire si les cryptos existeront toujours dans 10, 50 ou 200 ans, idem pour l’IA, mais nous aurons toujours besoin de nous déplacer. Nous serons pionniers, comme Clément Ader, Louis Blériot et autres Roland Garros ou Antoine de Saint-Exupéry.
L’objectif est de lever au moins 10 000 € pour faire levier auprès des banques et investisseurs afin de fabriquer le premier démonstrateur taille réelle du Bird biplace. Il nous faut un minimum de 500 000 € en fonds privés. La campagne doit dépasser 10 000 € avant le 9 février (41,5 % au 15/01).
Cette campagne permet aussi de tout vous dévoiler et de recueillir vos suggestions constructives et encouragements. Nous innovons pour vous et par vous.
L’un des objectifs est de permettre le transport de blessés, mais aussi de médecins, d’infirmiers, d’experts en cas de catastrophe. Bref, de permettre d’infiltrer et d’exfiltrer des personnes rapidement et efficacement là où d’autres véhicules ne pourront pas, quand le temps compte, quand il faut transporter des dons d’organes, retrouver des disparus, etc. (Quand le drone ne suffit pas et que l’humain est nécessaire, indispensable.)
Comment les contributions des investisseurs peuvent-elles accélérer le développement du Flycopter, et jusqu’à quand peut-on participer pour soutenir ce projet ?
Si nous dépassons le seuil de 10 k€ au 4 février, la campagne peut devenir permanente et permettre un accompagnement durable pour récupérer des bénéfices financiers et montrer l’intérêt de nos innovations.
Plus tôt nous aurons le budget pour passer à la réalisation du démonstrateur fonctionnel taille réelle, et plus vite le produit et la solution seront disponibles pour offrir une alternative à l’automobile (plus gros émetteur de CO₂, soit 30 % des rejets, 80 % des particules fines dues aux pneus et aux freins, des accidents fréquents, des accès limités aux routes qui imperméabilisent les sols, détruisent des écosystèmes et des paysages et coûtent plus de 40 Md€ par an) et à l’hélicoptère (bruyant, coûteux, difficile à piloter, consommateur).
Vous pouvez participer dès maintenant à la révolution FlyCopter pour une mobilité nouvelle dans les zones isolées et pour les déplacements inter-cités et inter-régions, tout en laissant de l’espace pour respirer et se promener à vélo et avec d’autres mobilités douces et intermédiaires.
Pour le Bird, la vitesse maximale est estimée à 200 km/h. En passant en mode avion, on va plus vite et plus loin. Pour prolonger l’autonomie, nous chargerons les batteries pendant le vol avec un générateur thermique existant sur le marché, fonctionnant au bioéthanol ou au biométhane, afin d’atteindre 2 heures d’autonomie.
Quels usages prioritaires imagines-tu pour le Flycopter, et comment pourrait-il transformer les déplacements quotidiens ?
Le sanitaire : transport de blessés, de malades (80 % des transports en ambulance se font assis en voiture), transport de médecins (type médecin volant dans les îles ou Médecins du Monde), d’infirmiers pour des prises de sang et des actes de soin, mais aussi de pompiers pour coordonner, surveiller, rechercher, intervenir rapidement lors d’urgences, effectuer des évacuations ou, au contraire, faire intervenir des techniciens et des experts dans des zones industrielles, des zones protégées, des zones inaccessibles.
Décarboner nos transports : imaginez demain un billet d’avion décarboné (en partie grâce à notre Bird, qui fonctionne à l’électricité et au bioéthanol/biométhane). Non seulement un Bird viendra vous chercher chez vous ou à proximité pour vous déposer près de votre avion long-courrier sur le tarmac, mais en plus, à destination, vous pourrez être déposé sur la plage, à votre hôtel ou chez votre client, voire chez votre ami qui vit en ermite en montagne ou dans la jungle (je cite souvent La Réunion avec son Piton de la Fournaise ou le cirque de Cilaos).
Les pilotes d’ULM, qui sont nos premiers clients et préconisateurs, conseillers, font aussi un usage touristique de ces appareils pour des baptêmes de l’air et des vols touristiques. Ils transportent également des photographes et des douaniers.
Nous avons aussi imaginé le garage qui accompagnera l’appareil : le « Vertidome », un garage autonome qui permettra, à l’avenir, des usages en copropriété ou en location, tout en sécurisant la zone d’atterrissage et de décollage, en protégeant les personnes, les débris, les animaux, tout en limitant le bruit et en protégeant l’appareil des tempêtes lorsqu’il est au sol.
Ce type d’équipement pourrait être installé dans le jardin d’un particulier, sur un toit-terrasse, un parking, un espace vert, et permettre à l’avenir des usages collectifs : comme un téléphérique sans câbles, une passerelle aérienne, une ligne de bus ou de tram mais sans arrêts inutiles, sans infrastructures lourdes au sol, et qui vous transporterait directement à votre domicile, votre travail, pour un vol touristique ou aux urgences avec un accompagnant. Imaginez cela sur la place de votre village ou au Jardin des Plantes.
Quels sont tes projets pour l’avenir du Flycopter Project et ses éventuelles évolutions ?
Le concept de la nacelle peut être développé suivant de nombreux modèles comme en automobile, en monoplace, en 4 places, en 2 place plus civière ou ambulance, en 8 places et plus.
Une vraie filière à développer pour créer de nouveaux emplois ou préserver les filières automobiles, car les concurrents l’ont bien compris de type de véhicules, c’est la voiture de demain, Joby est soutenu par Toyaota, Archer par Stelantis et Xpeng développe déjà ses voitures volantes en complément de gamme de ses voitures électriques.
Nous allons aussi nous diversifier avec une monoroue électrique tout terrain, un fauteuil léger électrique tout terrain, un four solaire lowtech, nous développons aussi un simulateur pour vous faire tester le Bird.
Comme l’humain est au centre de nos préoccupations, nous souhaitons soutenir l’éducation en travaillant avec des écoles comme l’EPIDE de st Brieuc, le Lycée corbière à Morlaix, l’IUT Lannion, l’IMT Atlantique Brest Rennes Nantes, L’ESTACA Laval et Paris Saclay mais aussi chacun d’entre vous à travers les fablabs Le Boc@l de Chemillé, le Fablab de Lannion, et autres ateliers partagés pour échanger les savoirs et les entraides.
Les salons comme le Nantes Makers Campus sont aussi très important pour nous, c’est l’occasion de vous rencontrer, d’échanger, d’avancer ensemble et de se soutenir mutuellement, nous ne pouvons rien sans vous, merci Jean-Marc, Jean-Baptiste, Makeme et tous les bénévoles, Makers…
Nos punch lines: Flycopter vous donne des ailes, le Bird pour décoller ou la sobriété d’un oiseau, « where we go we don’t need road » le Doc de Retour vers le futur, On n’est pas de pigeons mais on peut quand même voler. Flycopter pour se téléporter sans désintégration, sky’s the limit.