Portrait de Makers #43 > Jean-Marie Ollivier

Artiste de génie, ingénieur en automatisation et musicien, Jean-Marie Ollivier réunit toutes ces qualités autour d’un projet fou : Le Bistromatik ! Le Concept, un robot barman de 1,5 tonne qui sert des bières et de la limonade. Créatif au possible, Jean-Marie ne cesse de travailler d’arrache-pied pour faire de ses rêves une réalité en donnant une seconde vie à ces machines impressionnantes dont la gestuelle est millimétrée.

– Qui êtes-vous ?

Je m’appelle Jean-Marie Ollivier, j’ai 42 ans et je suis ingénieur spécialisé en automatisme. Je suis originaire du Trégor dans les Côtes-d’Armor où j’ai grandi à côté de Lannion. Mon métier d’Ingénieur m’a ensuite amené à m’installer à Rennes, puis aujourd’hui à Bruz à proximité de Rennes (où sont implantés mes ateliers) je travaille dans une entreprise d’ingénierie en automatisme, électricité et robotique où j’occupe actuellement un poste de chef de projets.

J’ai par ailleurs 2 passions, l’une pour les arts du spectacle en général et notamment pour la musique que je pratique depuis l’âge de 10 ans et une autre pour la technique ou l’envie de comprendre comment toutes les choses fonctionnent.

C’est donc naturellement, par l’association de mon métier et de ces 2 passions qu’est née cette idée, il y a une dizaine d’années, que de créer des machines de spectacle sur la base de machines industrielles déclassées.

– Passionné par les robots, ingénieur en automatisation, mais aussi artiste vous ne vous arrêtez jamais. Quel a été votre parcours ?

Effectivement, je dis souvent qu’une vie ne me suffira pas pour aller au bout de la pile de projets que j’ai dans la tête. Alors je les prends un par un et je considère que les soirées sont des secondes journées !

L’origine de cette passion pour les robots remonte à mon enfance où j’ai grandi à la ferme. Mes parents cultivaient des choux-fleurs, artichauts et pommes de terre dans le Trégor. Petit, je m’intéressais toujours à toutes ces machines à la ferme et je cherchais à comprendre comment elles fonctionnaient. Aussi dès lors que mes parents me confiaient des tâches que je considérais ennuyeuses comme par exemple conduire un tracteur à 2km/h pendant une journée entière pour planter des choux, je passais le temps à rêver d’une machine qui pourrait faire le boulot à ma place. Mes pensées étaient alors souvent très précises, j’avais des croquis et des modes de fonctionnement très détaillés qui me venaient dans la tête.

Alors mon parcours scolaire a dès la 4e été naturellement orienté vers la technique. J’ai obtenu un bac en électrotechnique (F3), un BTS en automatisme puis suis devenu ingénieur en 2001.

– Chez vous, c’est une véritable clinique pour les robots, il y en a partout. D’où viennent-ils et à quoi servaient-ils ?

Effectivement, j’ai d’ailleurs du retard dans l’attribution des prénoms, car oui,  j’ai l’habitude de leur donner un petit nom ! Le plus connu étant Nestor le barman. Aujourd’hui, j’ai 6 robots industriels que j’héberge dans des anciens poulaillers que j’ai transformés en ateliers. J’ai aussi installé un chapiteau de cirque de 18 mètres de diamètre dans mon (grand) jardin ou j’ai installé Le Bistromatik.

Plutôt qu’une clinique de robot, je dirais que c’est une maison de retraite pour robots ! Ces robots viennent principalement de l’industrie automobile où ils ont travaillé pour certains une vingtaine d’années jour et nuit. Pour autant la mécanique de ces machines étant tellement robuste, ils sont à peine usés au moment où l’industrie préfère les remplacer pour éviter des pannes.

Lorsque je les récupère, il y a une phase de remise en route qui selon les machines me prend plus ou moins de temps. Je me souviens avoir passé plus de 6 mois à dépanner mon premier robot en 2010.

– Vous avez inventé et créé le Bistromatik, un robot du nom de Nestor qui travaillait à l’usine PSA Peugeot à Rennes et qui aujourd’hui sert des bières. Comment en arrive-t-on à travailler sur un projet comme celui-ci et pourquoi ?

L’idée du bistrot n’est pas arrivée par hasard, j’aime ces lieux qui permettent les relations sociales. Le bistrot fait pour moi partie de ces lieux uniques de rencontre, de lien social, de découverte et d’animation locale. L’idée de se faire servir par un robot pose évidemment question et Le Bistromatik provoque justement par du second degré ce débat qui m’intéresse autour de la place de la machine dans la société.

Il y a aussi une part de rêve, j’ai beaucoup aimé la phase de conception de la machine. Il s’est passé 5 ans entre mon premier croquis et le premier verre servi en public en juillet 2016. C’est long 5 ans, il faut garder le cap et ce qui m’a porté c’est le rêve, je m’endors tous les soirs en pensant à mes machines.

Lorsque Nestor est à l’œuvre en festival ou dans les fêtes locales je regarde les yeux des gens et je retrouve, dans toutes les générations ces yeux d’enfants rêveurs. Cela me touche et je me dis alors que l’objectif est atteint !

– Quelles sont les problématiques lorsqu’on travaille avec des robots industriels de plus d’une tonne ?

Le poids de ces machines fait partie des principales contraintes. Dans la phase de conception du Bistromatik, il a fallu prendre en compte cet aspect tant sur le plan statique que dynamique. En effet lorsqu’un bras de 1,5 tonne tel Nestor entre en mouvement il se crée ce que l’on appelle des « moments » c’est-à-dire des forces qu’il faut bien prendre en compte. Nous avons dû faire des notes de calcul de stabilité pour bien dimensionner le châssis du Bistromatik.

Il y a aussi l’aspect manutention dans les ateliers où là nous utilisons un tracteur pour déplacer les robots !

– Depuis quelques mois, Nestor n’est plus le seul à reprendre du service. Pouvez-vous nous en dire davantage sur le Galtomatik ?

Depuis un an nous travaillons en effet sur une nouvelle machine qui cette fois fera des galettes. L’objectif est même de faire des galettes saucisses, un clin d’œil à mon pays d’adoption.

Nous venons de mettre au point un prototype qui pour l’instant est fixe dans un des ateliers. Le robot effectue le graissage de la bilig (comme on dit en Bretagne), il dose la pâte avec une louche, effectue l’étalage puis retourne la galette avant de la servir.

C’est la première fois dans mes projets de détournement de robot que je suis allé chercher le degré de précision au 10e de millimètre que ces machines sont capables de reproduire. Les étapes d’étalage et surtout de retournement auront nécessité quelques centaines d’heures de mise au point et quelques dizaines de litres de pâtes ! Aujourd’hui la machine fonctionne, et je m’amuse d’ailleurs parfois à lancer une petite douzaine pour le diner à la maison !

– Quels sont vos objectifs, vos envies et vos souhaits pour les mois à venir ?

Maintenant que la faisabilité de la machine à galette est confirmée, il s’agit de rendre l’installation mobile comme le Bistromatik. J’ai commencé à faire les premiers croquis et il me faut maintenant trouver des financements pour la construction qui je m’espère se fera l’hiver prochain pour une première représentation publique à l’été 2020.

J’ai aussi parallèlement, un autre projet d’associer ma passion pour la musique à celle des robots. J’ai récemment créé un nouveau programme qui permet à Nestor de jouer du violon entre deux verres servis au Bistromatik. Le résultat est bluffant, lorsque les premières notes ont retenti sous le chapiteau, j’ai moi-même été impressionné par le résultat. Cette expérience est en train de devenir le prochain projet qui mettra en scène probablement plusieurs robots industriels musiciens que j’imagine accompagner en live. À suivre !

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Jean-Marc Méléard
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